Comprendre les études sur la santé mentale et le risque suicidaire chez les jeunes transgenres / non binaires

Il existe de nombreuses études sur les jeunes transgenres ou non binaires (TGD) et le risque d’idées suicidaires, de tentatives ou de dépression. Mais il y a des limites importantes : les chiffres doivent être interprétés avec prudence.

1) Comment les études sont réalisées

  • Questionnaires auto-déclarés : beaucoup d’études demandent aux jeunes s’ils ont eu des pensées suicidaires ou des tentatives. Avantage : grande couverture. Limite : ce que le jeune dit peut varier selon le contexte et les souvenirs.
  • Dossiers médicaux / hospitalisations : certaines études utilisent les tentatives documentées ou les admissions pour automutilation. Avantage : données objectives. Limite : ne compte pas les idées suicidaires non déclarées et ne capture que ce qui arrive aux hôpitaux.
  • Registres de mortalité : permettent de mesurer le suicide, mais c’est rare pour les populations TGD à grande échelle. Les chiffres existent surtout dans certains pays (ex. Scandinavie) mais restent faibles et incertains.

2) Les principaux biais et limites

  • Échantillons non représentatifs : beaucoup d’études viennent d’échantillons cliniques ou communautaires (réseaux LGBTQ+), ce qui sur-représente les jeunes en détresse.
  • Mesures différentes selon les études : définition de « trans », « non binaire », période étudiée, types de questions sur idées ou tentatives suicidaires… → difficile de comparer les chiffres.
  • Études transversales : prennent « une photo » à un moment donné, donc on ne peut pas établir de causalité (ex. stigmatisation → risque suicidaire).
  • Données sur detransition et regret chirurgical : suivis courts ou interrompu, pertes au suivi. Les taux connus (~1 % pour regrets chirurgicaux) ne sont pas généralisables, et le taux réel de detransition est inconnu et risque d’augmenter ces prochaines années.
  • Politisation du sujet : certaines études avec résultats spectaculaires attirent plus l’attention que les études nuancées.

3) Idées suicidaires vs tentatives réelles

  • Idées suicidaires : surtout auto-déclarées par les jeunes. Cela indique leur souffrance, mais ce n’est pas la même chose qu’une tentative.
  • Tentatives : certaines sont auto-déclarées, d’autres documentées dans les hôpitaux. Les chiffres varient selon la méthode.
  • Décès par suicide : très rares dans les registres et difficiles à mesurer précisément chez les jeunes TGD.

4) Detransition / regrets chirurgicaux

  • Regret après chirurgie : taux faible (~1 %), mais études limitées et surtout sur des adultes opérés. Peu d’information fiable sur les jeunes ou ceux traités par hormones seules.
  • Detransition sociale ou médicale : prévalence inconnue, études hétérogènes, définitions variables.

5) Recommandations pratiques pour les parents

  • Écouter et prendre au sérieux la souffrance : l’idéation suicidaire est un signal important.
  • Prudence avant interventions irréversibles : privilégier d’abord le soutien psychologique et social.
  • Travailler sur les facteurs modifiables : soutien familial, réduction de la stigmatisation, espace pour explorer l’identité.

Ces facteurs diminuent fortement le risque suicidaire.

Références clés : 

  • Russell ST, Pollitt AM, Li G, Grossman AH. Chosen Name Use Is Linked to Reduced Depressive Symptoms, Suicidal Ideation, and Suicidal Behavior Among Transgender Youth. J Adolesc Health. 2018;63(4):503-505. PubMed
  • Thoma BC, et al. Suicidality disparities among transgender youth: Risk and protective factors. J Adolesc. 2019;74:82-97. PubMed
  • Olson KR, et al. Mental health of transgender children who are supported in their identities. Pediatrics. 2016;137(3):e20153223. PubMed

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