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Controverses thérapeutiques et tournant judiciaire : le cas de la Haute Cour britannique
Des divergences ont toujours existé entre les psychothérapies exploratoires, aussi désignées par l’appellation «thérapies d’attente vigilante», et les thérapies dites « affirmatives », aujourd’hui prépondérantes. D’innombrables études ont été publiées sur les bienfaits et les désavantages de l’une ou l’autre approche.
A cet égard cependant, le jugement rendu à Londres en décembre 2020 (v.o. EN) (version FR », synthèse »), dans le cadre d’un procès opposant une jeune femme à la Clinique l’ayant amenée, adolescente, sur le chemin de la transition médicale, constitue un tournant historique.
Il rend compte des incertitudes et controverses existant sur :
- la manière d’établir un diagnostic et un certificat de dysphorie de genre
- la qualification de la « capacité de discernement »
- l’âge auquel on devrait pouvoir entreprendre une démarche de transition
- la méthode d’accompagnement préconisée
Sur la base des dernières études existantes, la Haute Cour britannique établit un certain nombre de faits saillants concernant la prise de bloqueurs de puberté et d’hormones de l’autre sexe.
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Les bloqueurs de puberté ne sont pas « totalement réversibles ».
Les bloqueurs de puberté ne permettent pas de « gagner du temps », ils constituent la première étape d’un parcours médical dont très peu d’enfants sortent (98% des enfants auxquels on prescrit des bloqueurs de puberté poursuivent avec une hormonothérapie).
Il n’existe aucune preuve scientifique que les bloqueurs de puberté soulagent la détresse des jeunes.
La filière des bloqueurs et des hormones de l’autre sexe a de graves conséquences physiques, notamment la perte de la fertilité et de la pleine fonction sexuelle, avec des risques et des conséquences importants à long terme.
Régulation stricte des bloqueurs de puberté au Royaume-Uni : vers une limitation aux moins de 18 ans
Le jugement conclut aussi qu’il est très peu probable qu’un enfant âgé de 13 ans ou moins soit jamais compétent pour consentir à être traité avec des bloqueurs de puberté et très douteux que des enfants âgés de 14 et 15 ans puissent comprendre les risques et les conséquences d’un traitement à long terme.
Jugeant que ces traitements sont expérimentaux, la Cour a statué qu’ils ne pouvaient être administrés aux enfants sauf examen préalable du tribunal.
- Mise à jour 10.2021: La décision a été annulée en cour d’appel car « c’est aux médecins de prendre ces décision avec leurs patient-e-s ». Keira Bell a saisi la Cour suprême.
- Mise à jour 05.2022: La cour suprême a refusé d’examiner le cas.
- Mais en juillet 2022, le NHS annonce qu’il ferme la clinique du genre GIDS du Tavistock.
- et en octobre 2022, suite au rapport indépendant interim Cass, très critique des traitements d’affirmation du genre, le service de santé national NHS a publié des directives interim encadrant strictement les bloqueurs de puberté dans le cadre de la recherche expérimentale. Ces directives sont actuellement en cours d’évaluation publique. Le 12 mars 2024, le NHS interdit les bloqueurs de puberté pour les moins de 18 ans, car « il n’y a pas assez de preuves de leur sécurité et de leur efficacité clinique.
Source : Tribune de Genève, 31.01.2021 / © Paul Cooper/Shutterstock
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Quid des mesures prises pour le futur de nos enfants ?
Le 12 mars 2024, le NHS (National Health Service) du Royaume-Uni a annoncé l’interdiction définitive de la prescription de bloqueurs de puberté aux mineurs de moins de 18 ans, à l’exception des cas inclus dans des protocoles de recherche clinique. Cette décision fait suite au rapport Cass, une revue indépendante des services de santé pour les jeunes en questionnement de genre, qui a conclu à un manque de preuves suffisantes concernant l’efficacité et la sécurité de ces traitements. La Commission on Human Medicines (CHM) a également estimé que l’environnement de prescription actuel n’était pas sûr, recommandant une interdiction jusqu’à ce que des conditions plus sûres soient établies. Cette mesure sera réévaluée en 2027 .
En parallèle, le NHS a fermé la clinique GIDS du Tavistock en mars 2024, en raison de préoccupations concernant la sécurité des traitements. Elle a été remplacée par un modèle de soins plus axé sur l’accompagnement psychothérapeutique et l’exploration des causes sous-jacentes de la dysphorie de genre, plutôt que sur une approche médicale affirmant la transition.
Cette évolution marque un tournant dans la prise en charge des jeunes en questionnement de genre au Royaume-Uni.